dimanche 6 juin 2021

État général

Après le Ségur de la Santé, le Beauvau de la sécurité, place aux États généraux de la justice. Emmanuel Macron a annoncé ce week-end le lancement de cette nouvelle grand-messe. La manie d’organiser des assises et des états généraux sur tous les sujets épineux du moment restera probablement l’un des marqueurs de la méthode Macron : une façon de renvoyer chacun devant ses responsabilités afin de remettre à plus tard une décision difficile sur un dossier trop chaud. C’est un peu comme jadis les commissions, les rapports et les livres blancs. Sans oublier le Grenelle, évidemment. Grenelle de l’insertion, Grenelle de l’audiovisuel, Grenelle de la formation, Grenelle du très haut débit, Grenelle de la mer, Grenelle des ondes, Grenelle de la sécurité urbaine, Grenelle de l’Environnement… A ce train-là, on va finir par retrouver la France dans un sale état général.

jeudi 15 avril 2021

Jardin

Que l’on soit une grande asperge avec une drôle de binette, bête comme chou, cornichon, courge, gland avec rien dans le ciboulot ou jolie fleur qui fait florès ; que l’on soit fauché comme le blé parce qu’on l’a mangé en herbe ou qu’on en ait derrière les fagots sans trop bûcher pour mettre du beurre dans les épinards, le jardin nous renvoie à une certitude : le ver est dans le fruit et la vie nous fait la figue. On se prend des coups de bambou, on glisse sur des peaux de banane, on se faire secouer le cocotier, on se fait courir sur le haricot. Et ça ne s’arrangera pas. Il faut le dire sans langue de bois : un jour ou l’autre, on finira par sucrer les fraises, charrier dans les bégonias, yoyoter du bulbe. Sec comme un caroube, pressé comme un citron, pâle comme une endive, les carottes seront cuites et on ira manger les pissenlits par la racine. En attendant, cultivons notre jardin !

lundi 29 mars 2021

Syndrome

Vaccinodrome… Les temps changent. Les loisirs du week-end aussi. Jadis, il faisait bon aller à l’hippodrome regarder courir les chevaux, au cynodrome vérifier si les toutous tenaient la corde aux canassons, au vélodrome voir si les petites reines filaient toujours droit, au boulodrome taquiner le cochonnet ou à l’autodrome écouter vrombir les belles mécaniques. Exceptionnellement, on admirait les aviateurs et leurs prouesses acrobatiques dans les aérodromes. Les plus fous d’entre nous allaient même dans les cosmodromes pour vérifier si l’homme était capable de décrocher la Lune. Les intellectuels allaient à Noyon chercher du palindrome et les amoureux se retrouvaient dans les baisodromes. Mais peut-être que ces constats ne sont que les prodromes d’une nouvelle maladie, le syndrome du « c’était mieux avant ».

mercredi 10 février 2021

Pif

Dire que des gens sont payés pour rédiger des notices ! Une jeune américaine a posté, en fin de semaine dernière, une vidéo expliquant qu’étant à cours de son gel pour cheveux habituel, elle avait utilisé de la colle extraforte comme substitut, sous forme de spray. Résultat : elle s’est retrouvée avec les cheveux efficacement plaqués sur le crâne… et au bord des larmes sur les réseaux sociaux où tout le monde a donné son avis et où une collecte a été organisée pour financer l’inévitable opération chirurgicale. Les temps changent. Jadis, on lisait la notice avant d’utiliser un produit. Et puis on a inventé Internet. Mieux que les notices, on s’est mis à chercher des tutos pour utiliser un produit dans des conditions optimales. Maintenant, on utilise un produit au pif en se disant que si ça tourne mal, on ira crier au secours sur les réseaux sociaux… Et ça marche !

mardi 2 février 2021

Soviets

Voilà que faute d’approvisionnement suffisant, on va peut-être commander des vaccins aux Russes ou aux Chinois. Et c’est là qu’on se dit que le monde a vraiment changé. Imaginez un peu une telle situation avant la chute du mur de Berlin ! Ou encore à la fin des années vingt ! De quoi réécrire « Tintin au pays des Soviets ». Quel extraordinaire nouvelle mission pour James Bond ! A l’époque, on en aurait fait des caisses sur ces vaccins communistes qui contiendraient peut-être un autre virus caché, beaucoup plus sournois et dont l’antidote nous serait livré que si nos gouvernants confiaient le pourvoir à Moscou ou Pékin. Ou alors une substance invisible pour nous rendre anticapitalistes. Mais non, ça, c’est du passé. Moscou et Pékin ont déjà pris le pouvoir et ont remisé depuis belle lurette l’envie d’éradiquer le capitalisme !

mercredi 27 janvier 2021

Et après ?

Le Français est râleur. En termes plus chics, on parle d’esprit critique, on invoque Voltaire, Zola, Descartes et les autres qui nous ont inculqué que tout ce qui n’est pas parfaitement démontré à l’aune d’une indiscutable logique est discutable, proie au doute, sujet aux révoltes, intellectuelles ou sociales. C’est culturel. On compte les gouttes des doses, la vitesse à laquelle ces dernières parviennent dans les centres de vaccination, la distance qui sépare les expectorations et les narines. On se demande si les laboratoires pharmaceutiques ne seraient pas en train de faire monter les enchères. On se surprend même, parfois, à frôler le conspirationnisme. Bref, on doute, on s’interroge, on remet en question. Et quand l’histoire aura fait table rase de ces moments sombres, quand on aura définitivement basculé dans le monde d’après, on se dira que c’était mieux avant.

jeudi 7 janvier 2021

Étiquettes

Ingrédients, quantité, identification du fabricant, conditionneur ou vendeur, date de consommation, lieu de provenance, numéro de lot de fabrication, nutriscore et bientôt écoscore… Elles vont vraiment devenir illisibles, les étiquettes. Cela dit, avec un peu de courage et de terrain, on peut faire pousser fruits, légumes et élever poules, moutons, lapins, cochons... Il faut juste se baisser pour semer et ramasser (ce que notre civilisation a de plus en plus de mal à faire) et parfois se hisser pour cueillir. Exercice physique chronophage, mais très bon pour la santé. Pour manger les bêtes, il faut aussi se faire à l’idée de les vider de leur sang, de les débiter et de passer un nombre d’heures conséquent en cuisine pour assurer leur consommation. Il faudra au préalable vérifier tout ce que ce petit monde absorbe est parfaitement sain en lisant bien les étiquettes de ce dont vous le nourrissez.

dimanche 3 janvier 2021

Genre

Comme a eu l’amabilité de nous l’expliquer l’Académie française le 7 mai 2020, « Covid est l’acronyme de corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation. On dit ainsi la S.N.C.F. (Société nationale des chemins de fer français) parce que le noyau de ce groupe, société, est un nom féminin, mais le C.I.O. (Comité international olympique), parce que le noyau, comité, est un nom masculin. Quand ce syntagme est composé de mots étrangers, le même principe s’applique. » Sauf que d’aucuns se sont permis de continuer à dire « le Covid ». Cela dit, les variants récemment découverts en Grande-Bretagne et en Afrique du Sud enterrent la question. On va devoir parler du Covid au pluriel. Reste à savoir si on y met un « s » à la fin ou s’il faut dire un variant ou une variante…