vendredi 27 janvier 2012

Président-people

Est-ce que la Ve République est par nature celle du président-people ?

Pierre Sudreau avait une réponse à cette question. Il était le dernier survivant de ceux qui ont apposé leur signature au bas de la Constitution. Grand résistant, ancien maire de Blois, ministre de la Construction à 39 ans (il était alors le cadet du premier gouvernement), il est mort le 22 janvier. Un dernier hommage lui a été rendu ce 27 janvier aux Invalides.

Il m'avait accordé une interview pour la Nouvelle République (malheureusement disparue du Web en changeant de site) en octobre 2008, à l'occasion du cinquantenaire de la Ve. Son regard était caustique. Et ses mots restent terriblement d'actualité. Pour lui, le 4 octobre 1958, le président de la République n’était pas appelé à devenir une star.

" Je trouvais que l’idée de faire élire le chef de l’État par un collège composé d’élus qui avaient fait leurs preuves en politique (80.000 grands électeurs, députés, sénateurs, conseillers généraux, maires...) était un gage d’équilibre des pouvoirs. "

Ce système avait porté, le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle à la fonction suprême, mais il ne satisfaisait toutefois pas le général.

" Je crois qu’il avait une inquiétude, une angoisse dans sa relation avec les Français. Il pensait que le suffrage universel direct serait pour lui une sûreté, une garantie. "

En 1962, le référendum organisé par Charles de Gaulle permet d’introduire dans la constitution l’élection au suffrage universel direct du Président. Pierre Sudreau y était opposé. Il démissionne.

" A l’époque déjà, étant donné le pouvoir grandissant des nouveaux instruments de communication, j’étais convaincu qu’on risquait de se retrouver avec n’importe qui à l’élection présidentielle, y compris et surtout ceux qui savaient manipuler l’opinion publique, sous l’influence de groupes et des puissances de l’argent (...) et assujettis aux soubresauts de l'actualité. "

4 commentaires:

  1. @ Mike Hammer Papatam Andropov : tu devrais aimer ça aussi, alors.

    « Pour satisfaire au besoin d’imaginaire se sont créées des usines de rêve exactement comme il existe des usines de réalité. Ces usines de rêves, c’est-à-dire en définitive tout ce qui est lié à des transmissions dans le domaine de l’esprit - cinéma, télévision, radio - elles appartiennent ou bien à l’État ou bien au secteur privé. Quand elles appartiennent à l’industrie privée, quel but recherche celle-ci ? Certainement pas de dispenser de la culture, mais bien plutôt de gagner de l’argent. Pour cela, elle doit obligatoirement faire appel au maximum à l’instinct car c’est ce qui rapporte le plus. Notre civilisation est en train de comprendre qu’elle est en quelque sorte attaquée - ou soutenue, comme on voudra - par d’énormes puissances qui agissent sur l’esprit à travers l’imaginaire, et elle veut se défendre contre ces puissances-là. »


    André Malraux
    Présentation du budget des affaires culturelles
    9 novembre 1967

    C'était en intro de mon bouquin sur RDDV http://www.inlibroveritas.net/lire/oeuvre17650.html

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  2. Ah oui, quand même, ça a de la gueule.
    Bon.
    Ceci dit on en est toujours là, non ?

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  3. @ Mike Hammer Papatam Andropov : Oui. C'est bien le problème.

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