lundi 31 décembre 2012

A la pelle

Qu'elle soit morte, lourde, pâteuse ou étrangère, vous auriez de la peine à vous en dispenser. C'est probablement pourquoi on l'ôtait aux renégats : elle est capable de virer vite en mode "de pute" ou "de vipère".

La mienne m'a ouvert des horizons que mes yeux ne pouvaient percevoir, sentir des reliefs que mes doigts n'auraient jamais pu palper. Entendre des voix inaudibles, aussi.

En public, à table ou au lit, elle est le plus précieux des organes. C'est pourquoi la société nous conseille de la garder dans notre poche avec un mouchoir dessus afin qu'elle n'en sorte pas trop vite.

Je crois au contraire qu'il faut la délier. Quand bien même elle fourche, elle reste curieuse, sensible, acerbe parfois, mais toujours bien accrochée.

Elle ne vous trahira jamais si vous prenez soin de ne l'utiliser qu'après l'avoir tournée un nombre suffisant de fois dans son orifice. Et dans celui de l'autre.

jeudi 27 décembre 2012

L'emballage

Le recyclage des déchets est un des grands défis environnementaux du XXIe siècle. Les emballages, notamment, polluent la planète.

A titre d'exemple, un rapport américain avait noté qu'en 2011, plus de 75 millions de tonnes de papier d'emballage avaient été gâchées et seulement la moitié avait été recyclée.

Mais tout n'est pas perdu. Des scientifiques ont développé une solution révolutionnaire : les emballages… comestibles. Un rêve ? Non. Bob's, une chaîne de restauration rapide brésilienne, vient de s'y mettre.

Ses clients peuvent désormais dévorer leur hamburger tout en avalant son papier d'emballage. Et après un premier essai, les consommateurs semblent… emballés.

Reste une question : si les emballages comestibles deviennent des aliments, ne serait-il pas plus prudent, par mesure d'hygiène, de les emballer ?

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Billet initialement publié ici.

jeudi 20 décembre 2012

Démocratie

Ça m'agace. C'est idiot mais ça m'agace, ces histoires de gens riches qui se tuent à défendre leur fortune par tous les moyens possibles pour échapper à l'impôt.

Et pourtant, je peux vous dire qu'entre le Fisc et moi, c'est pas une histoire d'amour. Je suis né dans une famille de petits commerçants prospères des Trente Glorieuses ruinée par un contrôle fiscal.

J'étais pré-ado quand nous sommes devenus pauvres. Je m'en suis rendu compte un samedi matin où, contrairement aux autres, ma mère m'a expliqué en pleurant qu'elle ne pouvait pas me donner mes dix francs hebdomadaires pour aller acheter mon bouquin de la semaine à la librairie parce que nous étions ruinés.

Je me suis consolé en lisant les vieux classiques empoussiérés dans la bibliothèque et en séchant les cours pour aller faire des conneries avec les mauvais gamins de mon âge.

Une pratique assidue de l'échec scolaire m'a fait comprendre qu'en sortant du système, c'était moi le crétin. Que cet argent que nous n'avions plus, parce que le Fisc nous l'avait pris, nous pouvions le retrouver en retournant au lycée, en faisant des études.

Alors j'y suis retourné et j'ai bossé comme un malade pour rattraper deux années perdues dans les chemins de traverse. Le pré-délinquant est devenu sur le tard un bon élève. Sa copie de philo au bac a même été publiée dans les annales.

J'ai fait pion pour me payer mes études de droit. J'ai bossé la nuit au grand quotidien régional de Ch'Nord pour poursuivre ma scolarité à l'école de journalisme de Lille.

Je vous jure, j'en ai bavé pendant des années à dormir trois heures par nuit pour m'en sortir. Il y avait probablement derrière tout ça une envie revanche sociale qui se cachait. J'avoue. Parfois, la rage que l'on éprouve en voyant les autres, gamins de riches, profiter de la vie après les cours le soir quand vous, vous devez aller bosser...

Mais au fil du temps, la vie, la vraie, efface les mauvais sentiments. Journaliste salarié, je me suis retrouvé un jour au chômage et j'ai apprécié d'être indemnisé. J'en ai profité pour me mettre à mon compte, et je n'ai pas bronché en constatant qu'à chaque fois que cent euros rentraient, je devais en payer 60 à l'État.

Quand mon père est parti, emporté par un troisième cancer, j'ai compris que cet argent que le Fisc lui avait pris servait à faire fonctionner l'unité de soins palliatifs qui l'a accompagné dans la mort. Et quand cette dernière a failli emporter ma femme, j'ai été fier d'entretenir en payant mes impôts ce système de santé qui lui a sauvé la vie.

Aujourd'hui, nos enfants vont à l'école de la République. On a beau dire, elle est imparfaite, mais ils y apprennent beaucoup de choses. Et ce qui n'est pas au programme, nous nous en chargeons avec bonheur.

Je leur explique, aussi, que tout ça existe parce que nous vivons dans une République qui ne fonctionne que parce que nous consentons à l'impôt et que si ce dernier venait à devenir injuste, ça ne serait pas en tentant de s'y soustraire que ça s'arrangerait, mais en changeant ceux à qui nous confions mandat, par des élections libres, de l'établir. C'est ce que nous avons coutume d'appeler une Démocratie.

lundi 17 décembre 2012

Depardieu

C'est l'histoire d'un petit Berrichon avec une grande gueule qui a réussi à sortir de Châteauroux par le grand écran. C'est une chance extraordinaire qui devrait inspirer l'humilité. Mais bon, parfois, la notoriété vous grise.

Au début, on fait des efforts pour jouer avec des grands et puis avec le temps, on finit par croire qu'il suffit de jouer son propre rôle. Et les grands vous boudent.

Alors on se diversifie, on mise sur des affaires qui marchent, on perd le sens du risque, on investit dans la vigne (c'est bon pour la défiscalisation) et on fait de la pub...

Bref, comme disait Michel Audiard : " Le grand défaut des comédiens, un égoïsme plus démesuré encore que chez les autres êtres humains"...

Mais parfois, de simples tweets valent mieux qu'un long billet.







Faut dire aussi que Nico savait beaucoup mieux s'y prendre que Fanfan avec Gégé.

samedi 15 décembre 2012

Bande de tarlouzes

Qu'on se le dise : seuls les couples hétérosexuels peuvent concevoir et élever correctement des enfants. C'est comme ça. Pourquoi ? Parce que c'est dans la nature et la morale des choses. Les autres, c'est des tarlouzes.

Car il faut une image du père et de la mère toute propre, ainsi qu'un univers moral immaculé pour élever des enfants. D'où le modèle fondateur du couple hétérosexuel. Les homosexuels, on le sait, sont pervers par nature, et si cette dernière ne leur permet pas de se reproduire entre eux, doit bien y avoir une bonne raison.

Il ne viendrait pas à l'esprit d'un des deux conjoints d'un couple hétérosexuel l'idée de tromper l'autre, pas plus que celle de se palucher en rêvant qu'il copule avec un ou une autre, ou plusieurs.

Le couple hétérosexuel reste fidèle et solide. Il ne recompose jamais sa famille deux ou trois fois de suite. Il n'a donc jamais à expliquer à ses enfants qu'ils ont plusieurs mères et plusieurs pères. Ça serait très déstabilisant.

Le couple hétérosexuel ne se retrouve jamais embarrassé quand un de ses enfants qui utilise son ordi trouve une vidéo à caractère pornographique ou un mail un peu chaud adressé à une tierce personne, car ça n'arrive jamais.

Le couple hétérosexuel a un sens inné de la vie de famille. Il ne se fout jamais sur la gueule devant sa progéniture. Pas plus qu'il ne fait de mal, physiquement ou moralement, à cette dernière.

Bref. Qu'on se le dise : seuls les couples hétérosexuels peuvent concevoir et élever correctement des enfants. C'est comme ça. Pourquoi ? Parce que si les couples hétérosexuels étaient pervers par nature et incapables de concevoir et d'élever correctement des enfants, ça serait rien qu'une bande de tarlouzes.

jeudi 22 novembre 2012

Aliénation

Nous devons tous être victimes, depuis le dimanche 18 novembre 2012, d'une nouvelle sorte d'aliénation.

Je m'explique. Les partis politiques sont utiles au bon fonctionnement d'une démocratie normale, car ils permettent aux citoyens de se rassembler derrière des formations transformant la somme de leurs intérêts particuliers en intérêt général.

Une fois sanctuarisées par chaque formation, ces conceptions partisanes de l'intérêt général s'affrontent aux élections afin de devenir majoritaires et de pouvoir s'appliquer uniformément à l'ensemble du corps électoral.

Électeurs, sympathisants, militants, permanents, candidats, élus, assemblées représentatives, gouvernement, chef de l'Etat... Ce système est une formidable machine à aliéner la liberté des uns qui doit bien s'arrêter là où commence celle des autres, sinon, c'est l'anarchie.

Corrélativement, pour que ce système fonctionne, il faut le financer. Tout le monde s'y colle : les militants en cotisant et les électeurs en payant des impôts, dont une partie est utilisée pour financer ces partis (c'est un sujet très sensible, semble-t-il), sans parler de celle qui sert à indemniser les élus de la majorité et ceux de l'opposition.

On peut logiquement déduire de ce qui précède une conséquence nécessaire : dès lors qu'un parti politique n'assure plus toutes ces conditions, il est prié de rendre la thune. Aux militants à jour de cotisation et aux contribuables, aussi, qui ne sont pas des aliénés.

lundi 12 novembre 2012

Sérendipité

La sérendipité est le fait de réaliser une découverte inattendue grâce au hasard et à l'intelligence. Ceci n'est probablement qu'un détail du papier de mon camarade Vincent Glad sur @leLab_E1, mais j'ai toujours pensé que le diable est dans les détails.

Vincent a raison (ceux qui suivent nos relations tourmentées sur Twitter savent que je n'ai pas l'habitude de lui servir la soupe). Les "5 gus dans un garage" font un boulot remarquable, utile à la démocratie en cela qu'ils nous informent pour nous éclairer.

Comment ça, me direz-vous (et vous avez un peu raison) : des petites phrases, des tweets de travers, des fails et du lol... Qu'est-ce que le citoyen en a à foutre ? Cette écume de la mousse de l'information n'a ni plus ni moins d'intérêt que la presse people, que je défends aussi.

Pour ceux qui auraient lu trop vite le papier de Vincent, je vais reproduire ici un paragraphe essentiel :

"Outre Internet, l'autre source d'info principale du Lab se trouve dans les vieux journaux de presse écrite. C'est là où est le coup de génie (certes emprunté à Morandini) : les journalistes du Lab épluchent tous les matins la presse politique à la recherche de petites phrases passées inaperçues. Comme pour les tweets, chaque brève politique de L'Express, du Point, du Canard ou du Nouvel Obs peut se transformer en article sur Le Lab, une prédation d'audience qui profite de l'incapacité des sites des hebdos à capitaliser sur ce matériau précieux."

Eh oui : la bonne vieille brève ! Ce grand art oublié qui est pourtant à l'origine des plus belles heures de la presse. Ces petites choses qui se mangent sans faim pour mettre le lecteur en appétit avant de plonger dans les sujets de fond.

C'est une vieille recette, oui. Car contrairement à ce que beaucoup de crétins experts à la mémoire courte essaieront de vous faire croire : le net n'a rien inventé. Le lol existait avant le lol. On appelait ça "dérision", "second degré" ou "humour noir". Le "fact checking", c'est la bonne vieille vérification de l'info et le "crowdsourcing" n'est autre qu'un avatar de l'enrichissement de l'info grâce au courrier des lecteurs.

Bref, URL ou IRL, ce métier reste le même depuis Gutenberg : les échotiers rapportent de petites phrases et reporters se permettent de les mettre en écho. Qu'importe le média.

La seule vraie différence, c'est que nos politiques n'ayant plus vraiment grand-chose à dire de fondamental, nous nous retrouvons, nous, journalistes, bloqués à la surface, privés de cet oxygène nécessaire pour atteindre les profondeurs. Alors nous y surfons.


La sérendipité est le fait de réaliser une découverte inattendue grâce au hasard et à l'intelligence. Oui. Et les fruits du hasard, faute d'intelligence, finissent par pourrir.

vendredi 26 octobre 2012

Panem et circenses (bis)

Faut bien distraire le peuple. Et chaque jour, c'est pire. J'ose pas revenir sur le bilan de la semaine écoulée dans les arènes de l'information pipolitique. Entre les conseils matrimoniaux de Carla ("Il me semble qu'il est plus simple d'être l'épouse légitime du chef de l'Etat que sa compagne") et le revival de Ségolène ("A un moment, il faudra que je rentre dans le dispositif"), les pains abondent et tout le monde joue. A quoi ? Je ne sais pas.

Mais le meilleur - ou le pire, c'est selon - c'était évidemment jeudi soir, chez Pujadas. Des (petits) pains (au chocolat) et des jeux, Copé sait faire. Mais je ne vais retenir qu'un de ses plus beaux numéros : les alliés de la gauche extrême du PS (ne) sont (pas) pires que ceux de l'extrême droite que l'UMP convoite. Juste une remarque en passant : quand on revendique sa résistance, il est préférable de ne pas oublier quel camp avait choisi le PCF à l'époque évoquée par la notion. Mais bon. Nous n'en sommes plus à une trahison de mots près.

Ce qui m'amène à la deuxième trahison de mots, celle de l'autre : Fillon. Il préfère l'assimilation à l'intégration, et ça vaudrait même une réforme constitutionnelle. L'argument de fond : la France - historiquement diverse et variée grâce à des immigrés devenus plus Français que les Français - n'a plus les moyens d'accueillir les étrangers aussi dignement qu'avant.

Là, mon sang de Ch'ti n'a fait qu'un tour. J'ai passé mon enfance et ma jeunesse entre les fabriques du textile, la vallée de l'acier et le bassin minier et je peux vous la chanter à la Bachelet ou vous la réciter à la Zola : au Nord, c'était les corons (pour les immigrés). Et si c'était des conditions d'accueil dignes, brûlons les derniers exemplaires de Germinal en circulation dans les bibliothèques de France.

Enfin voilà, quoi. Panem et circenses : on a encore servi au petit peuple du pain et des jeux. Sauf que le pain est rassis et les jeux de moins en moins divertissants. Au point que j'en viens à penser qu'à ce rythme, le petit peuple va finir par avoir envie de jouer à mettre des pains. Et on sait bien à qui ça profitera.

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J'ai intitulé ce billet Panem et circenses (bis) parce que j'ai déjà titré un billet Panem et circenses sur ce blog. Vous pouvez - ou pas - y voir un rapport.

lundi 15 octobre 2012

J'hallucine

Donc, Peillon, qui avait pourtant raison, a été recadré par Ayrault. C'est dommage.

Pour des raisons de calendrier, nous avons donc encore raté une occasion de parler des sujets importants, ceux qui touchent la vie des Français au quotidien. Le cannabis, ses naufragés et ceux qui savent en profiter. Marine sourit en attendant son heure.

Les dépendances, ça me semblait pourtant intéressant dans un pays de toxicomanes. Car selon mes calculs, en effet, la patrie est en danger.

Pour résumer : 13,4 millions de Français ont déjà essayé le cannabis, 10 millions prennent des psychotropes, cinq millions sont alcooliques, cinq autres millions sont accros au sexe, un million sont victimes de troubles du comportement alimentaire et 600.000 sont touchés par l'addiction aux jeux d'argent. Ne pas oublier les 14 millions de fumeurs de tabac, ce qui nous mène à un total de 35 +14 = 49 millions de toxicomanes.

Et comme me l'ont fait remarquer @lucnat1 et @saramoki : la liste n'est pas exhaustive. J'ose pas ajouter les workaholics, parce que là, ça fait plus de Français toxicos que de Français : avec un actif sur deux (sur une population active de 31,2 millions), ça nous donne une quinzaine de millions de dépendants à ajouter aux 49 millions d'autres, soit 64 millions. Sachant que la France compte 64 millions d'habitants...

J'imagine, évidemment, que certains cumulent l'alcool, la clope, les médocs, le chichon, le cul, le casino et tout le reste. Certes, les lobbies de l'industrie pharmaceutique, du tabac, des jeux, du sexe, de la bouffe et de l'alcool sont peut-être plus puissants que celui du blanchiment de la dope (cela dit, j'ai des doutes), mais tout de même...

Bref, j'hallucine.

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Mise à jour du 16 octobre, 13 heures : si l'affaire Lamblin à l'origine de ce débat avait porté sur du blanchiment d'argent dans le marché de l'art au lieu du chichon, ça rendrait la réforme de l'ISF plus drôle. Du coup, tant que j'y pense, faudrait peu-être songer à soumettre à l'ISF les barons de la drogue et les dealers, ça permettrait de les exiler fiscalement.

vendredi 12 octobre 2012

De chair et d'os

Envie de manger, soif d'apprendre, désir de goûter, besoin de prendre... L'être humain est fait de chair et d'os. Certains ont même inscrit dans les tables la date de naissance de l'espèce : le jour où la chair de l'un serait sortie de l'os de l'autre.

Bref, on dort, on boit, on mange, on fornique. On se nourrit de choses matérielles ou immatérielles qui nous donnent souvent du plaisir, parfois du dégoût, mais toujours de la consistance.

Malbouffe et mal-baise sont les pendants de cet art de vivre, car il n'est pas à la portée de toutes les bourses. L'animal politique connaît des fortunes diverses.

La politique, justement, nous laisse parfois sur notre faim. Pour en observer les moeurs, pas plus tard qu'hier, je me suis repassé en boucle une émission de télé comme on décortique un poulet. La pipolitique, ses secrets de fabrique, sa recette cachée... On tourne autour du pot depuis que la chair est née de l'os de l'autre.

Les forts en gueule sont-ils gourmands sous la ceinture ? Les puissants de la chose publique le sont-ils aussi au lit ? Autant de questions que le fidèle, le sujet ou le citoyen se posent, car l'homme a envie de manger, soif d'apprendre, désir de goûter toutes ces choses matérielles ou immatérielles qui nous donnent souvent du plaisir, parfois du dégoût...

La femme de Jésus, les favorites du roi, les ex du président ou de sa compagne, ça a toujours mis l'eau à la bouche, et même si ça ne nourrit pas son homme, ça ne mange pas de pain.

En tout cas, moi, j'avoue, les goûts de ceux qui dressent le menu quotidien, ceux à qui nous avons donné le droit de nous mettre à la diète ou de nous refiler du rab, ça m'a toujours mis en appétit, vu que je suis fait de chair et d'os.

dimanche 7 octobre 2012

Antithèse

Laissons faire Marine, Jean-François et les autres colporteurs des thèses du front national. Pourquoi ? Parce que c'est la meilleure façon de les tuer - politiquement, je veux dire - à petit feu.

Je l'ai déjà dit : plus ils ressassent et refourguent les mots des fafounets, plus ils se fourvoient tous et c'est là que ça devient intéressant.

L'homme blanc, sa supériorité et toutes les fariboles, balivernes et autres fadaises qui en découlent ne méritent pas qu'on se fatigue à les démystifier ou qu'on s'use à les démythifier.

En revanche, on peut croire, comme ça s'est souvent produit dans l'histoire, que la haine et le rejet de l'autre sont un processus d'autodestruction efficace.

Dans leur course folle pour trouver la solution finale à leur problème fondamental, les anti-racistes-anti-blancs purs finiront bien par avoir la peau des anti-racistes-anti-blancs impurs.

Ensuite, on peut parier qu'à l'intérieur même de la famille des anti-racistes-anti-blancs purs sortie victorieuse se dégagera un groupe d'anti-racistes-anti-blancs purs intégriste qui trouvera moyen d'exterminer - politiquement, je veux dire - les anti-racistes-anti-blancs purs pas assez purs.

Toute thèse trouve son antithèse et ses racistes antithèse.

vendredi 28 septembre 2012

Dans tes rêves

Salut, toi, le Français jamais content.

Il était pas sexy, Ayrault, hein ? Ben ouais. Mais est-ce que c'est son métier, mec sexy du prime-time ?

Ah, c'est vrai, t'as pris l'habitude ces cinq dernières années. La pipolitique, les grands shows sur TF1 avec le Jean-Pierre (Pernaut) qui invitait des Français au comptoir du café du commerce pour tailler le bout de gras avec le Nico.

Je peux comprendre. C'est vachement austère, un Ayrault à qui on demande, après une énorme période d'exercice du pouvoir (quatre mois, dans notre société du temps réel et de l'immédiateté, c'est une éternité) de rendre des comptes sur sa façon de régler des problèmes vieux d'au moins trente ans.

Alors, ça va se passer comme prévu. Dans 45 secondes, ton téléphone va sonner. Ça sera un de ces instituts de sondage à la con qui te feront oublier que t'as pas que ça à foutre que de répondre à leurs questions débiles en te faisant miroiter des vacances aux Antilles.

Ils vont te demander : " Comment avez-vous trouvé Ayrault qui causait dans le poste hier soir " (1. convaincant, 2. pas convaincant, 3. entre les deux ou 3. ne se prononce pas) ?

Et là, tel que je te connais, c'est la réponse numéro deux qui va te sortir de la bouche avant même que tes neurones se soient excités.

Je peux comprendre. T'as fini par croire qu'un coup de baguette magique sur un plateau de télé pouvait changer le réel. Dans tes rêves.

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Mise à jour du 29 septembre : comme prévu.

vendredi 21 septembre 2012

Ostentatoire

L'interdiction du voile et de la kippa... Et pourquoi pas celle de la Rolex, des Ray-Ban et de l'iPhone 5 ?

Cela dit, l'humanité a toujours eu un problème avec les signes ostentatoires. C'est peut-être même ce qui la définit le mieux. Dès que l'homme a eu l'idée d'utiliser les peaux des bêtes qu'il mangeait pour se vêtir, ils s'est mis à y accrocher des dents, des griffes ou des coquillages pour se distinguer de ses semblables.

Se montrer différent, graver sa vérité dans la pierre, l'imprimer sur du papier, la crier devant la foule, la diffuser sur les ondes... L'homme s'affuble souvent de babioles et de fables, car il est ostentatoire.

L'homme ostentatoire. C'est un peu sa façon de masquer le manque de fond en croyant sauver les apparences : la forme faute de fond, l'image privée de contenu, le vide derrière l'écran. Les signes extérieurs ne sont que la face émergée de l'iceberg du vide intérieur.

D'où ma conviction que tout être humain normalement constitué devrait se contenter de rester invisible.

Mais comme j'ai davantage de doutes que de certitudes, je me pose beaucoup de questions. Dont celle-ci : interdire certains signes ostentatoires, est-ce pire que d'en imposer d'autres ?

Car oui, ça existe, le port obligatoire d'un signe ostentatoire : l'uniforme sous les drapeaux, la tenue dans les prisons ou le costume dans certains établissements d'enseignement.

Un jour, même, des hommes ont eu l'idée d'imposer à d'autres le port d'un signe ostentatoire. C'était une étoile. De couleur jaune. J'espère que ceux qui demandent aujourd'hui l'interdiction du voile et de la kippa n'ont rien à voir avec eux.

Ou alors le font-ils en parfaite connaissance de cause. Juste sans ostentation, pour rester invisibles. Et soudain, ma foi en l'homme invisible s'effondre.

Je vais donc me planquer, rester terré chez moi, n'en sortir qu'en cas d'urgence. Et pour ne pas être reconnu, je vais me masquer. Je sais déjà comment : le port d'un voile, d'une kippa et de Ray-Ban devrait me rendre moins ostensible.

lundi 17 septembre 2012

In no sense

L'Innocence des Musulmans (Innocence of Muslims en VO)... Le titre du nanar qui agite quelques milliers de fanatiques et de médias a été terriblement bien choisi.

L'innocent, c'est celui qui n'est pas coupable des faits qui lui sont reprochés, mais aussi le simple d'esprit, ou encore l'homme dont la naïveté lui permet de réussir son entreprise (aux innocents les mains pleines).

Nous voilà donc en face d'innocents (à quel point fallait-il être niais pour produire une telle daube ?) qui ont trouvé le moyen de provoquer d'autres innocents (eh oui, il existe des habitants sur cette planète qui sont capables de croire qu'une vidéo douteuse circulant sur le web résume la pensée d'une nation) dans un conflit où chacun met en cause l'innocence de l'autre (c'est pas moi le méchant, c'est toi, la preuve)...

Le problème, c'est qu'en général, quand les innocents tranchent, les coupables perdent la tête, même s'ils ont prouvé leur innocence.

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Merci à George Washington pour l'idée du titre de ce billet ("The government of the United States is in no sense founded upon the Christian religion"). Ceux que ça intéresse peuvent lire le billet de Rimbus sur le traité de Tripoli.

samedi 4 août 2012

Hou hou, ha ha

J'imagine le néandertalien voyant passer un invraisemblable troupeau de gibier appeler les membres de son clan par une sorte de cri sonnant comme un hou hou, ha ha.

Mais forcément, ils sont trop loin. Alors il décide de trouver un moyen pour donner à voir la scène aux absents.

Le pouvoir de l'image est effrayant. Une vidéo emporte tout sur son passage, comme un tsunami informatif. Elle dit désormais a des millions d'êtres humains ce qu'ils doivent croire et ce dont ils feraient mieux de douter. Plus efficacement encore que les choses écrites.

Ces images balaient aussi les millénaires qui nous séparent de cette époque où, dans une évolution chaotique, nos ancêtres se mirent à se dresser sur leurs pattes arrières, affranchissant leurs membres supérieurs de la corvée de la balance des deux autres inférieurs pour leur laisser cette liberté précieuse : manger avec les doigts ou tremper ces derniers dans des pigments afin de maculer la pierre de dessins, puis de signes et enfin d'écritures.

Ensuite, des siècles d'évolution permirent à l'espèce de faire tri entre ce qu'il était bon ou mauvais de transcrire. Johannes Gutenberg finit par mécaniser le dispositif, mais l'homme étant souvent illettré et toujours pressé, il ne fallut pas attendre des millénaires pour que la transmission radiophonique puis audiovisuelle s"impose.

Et puis nous voilà, avec nos tablettes, notre écriture tactile, nos systèmes de reconnaissance vocale qui déclenchent la vidéo de nos terminaux portables et leur partage avec nos semblables.

Bref, l'humanité a fait de sérieux progrès : quand on voit passer un invraisemblable troupeau de gibier, plus besoin d'apprendre à dessiner ou à écrire. On gribouille sur nos ardoises ou on prononce le mot qui convient afin qu'elles dessinent la scène à notre place. Ensuite, on clique pour rameuter les troupes. Même plus la peine de gueuler un hou hou, ha ha.

vendredi 22 juin 2012

Loup y es-tu

Vous connaissez tous, enfin j'imagine, l'histoire des trois petits cochons. Un grand classique. Mais jamais personne avant moi ne vous aura dit la vérité : il existe un cochon caché. Il joue pourtant un rôle majeur dans l'histoire.

Viré par sa maman comme les trois autres, avant de se lancer dans le bâtiment, il a pris le temps de réfléchir sur le sens de la parole maternelle.

Je voudrais que vous partiez d'ici et construisiez votre maison, dit-elle, mais prenez garde qu'elle soit bien solide pour que le grand méchant loup ne puisse entrer et vous manger.

Assez calculateur, ce quatrième cochon s'est alors dit qu'il était urgent d'attendre de voir ce que feraient les trois autres de la fratrie avant d'agir à son tour. Les petits derniers sont souvent comme ça.

Il vit ainsi ce que devint la baraque en paille du premier, la masure en bois du deuxième et la bicoque en brique du troisième. Il se rendit compte, surtout, du pouvoir phénoménal de la peur du loup et de ses conséquences sur le marché de l'immobilier chez les cochons.

Aussi - et c'est précisément la raison pour laquelle on ne parle jamais de ce quatrième cochon - il décida de passer un pacte avec le loup et de trahir ses aînés pendant que le troisième cimentait les briques.

OK, le loup, je vois bien ton obstination : je sens venir le coup de la descente par la cheminée. Comme les frangins sont pas complètement niais, ils vont te préparer un coup fumant. Mais si tu veux bien la jouer 50 / 50, je peux t'arranger l'affaire et on va se faire un max de thunes.

Interloqué, le loup s'empressa de demander au quatrième cochon de l'affranchir un peu davantage.

C'est pas compliqué, mon grand loup : toutes les cochonnes finissent un jour ou l'autre par envoyer leur progéniture paître. Et comme ils ont peur, ces bleus, de se faire bouffer par toi, la première chose qu'ils font, c'est de chercher des matériaux de construction pour se mettre un toit plus ou moins solide sur la tête. Donc, si on arrive à mettre la patte sur les marchés de la paille, du bois et de la brique, on va se faire des couilles en or. A quoi bon chasser le cochon quand tu peux payer des crétins pour le faire à ta place et te les servir tout cuits, en plus ? Évidemment, faut entretenir la peur du loup, d'où notre deal : on s'associe, je te sauve, tu me protèges et on partage les dividendes.

Le loup, loin d'être aussi idiot qu'on le raconte en général, sentit parfaitement le potentiel du quatrième cochon et décida de conclure le marché. Les détails techniques de la suite sont assez simples : le quatrième cochon balança un loup en peluche bourré de somnifères dans la cheminée. Les trois autres s'endormirent après la première bouchée. Le lendemain était née la WolfPig company et dans la foulée sa nébuleuse de filiales et de sociétés offshores.

Matières premières, mains d'oeuvre, agences immobilières, banques... la WolfPig company, rapidement en tête sur toutes les places boursières, inventa même les agences de notation pour punir les mauvais élèves ayant oublié la leçon de l'histoire du loup et des cochons, modèle économique devenu universel, incontestable et défendu par une grande majorité d'experts. Quelques acquisitions de grands groupes de presse permirent de faire avaler le tout aux cochons sceptiques.

La fin de l'histoire ? Le quatrième cochon devint la première fortune de la planète au classement Forbes. Il fit aussi la une de beaucoup de tabloïds pour ses scandales avec de nombreuses cochonnes. Le Loup, davantage discret mais de plus en plus gourmand, avala à peu près toute la population porcine de la planète au point d'en finir par loucher sur le seul restant : le quatrième cochon.

mardi 19 juin 2012

Des corbeaux et des grenouilles

Il faut vraiment souhaiter bonne chance à ce nouvel état PS qui détient désormais tous les pouvoirs ou presque en France, quand bien même la France ne détient à peu près aucun des pouvoirs capables de décider du sort des habitants de cette planète.

Espérons donc que l'idée d'une relance européenne soit aussi brillante que les Lumières qui firent longtemps notre réputation à nous, mangeurs de cuisses de grenouilles qui coassent.

Parce que si d'aventure cela n'était pas le cas et que nous devions nous enfoncer encore davantage dans le marasme et la récession, la disparition des merles après celle des grives ne nous laissera à cuisiner que les corbeaux. Et les corbeaux, c'est pas bon. Certes, pour l'instant, ils ne sont que deux à pouvoir croasser dans l'assemblée du peuple, mais les autres guettent.

Bref, je souhaite sincèrement à ce nouveau pouvoir de merder moins davantage que le précédent, parce qu'après 2012, y'aura 2017. En en 2017, les corbeaux que nous n'aurons pas mangé risquent fort de se multiplier et d'avaler toutes les grenouilles.

samedi 16 juin 2012

Droite droite

1. "Comme pour le second tour de la présidentielle où l’ensemble des patriotes devaient voter pour la droite, j’appelle tous les électeurs – dont ceux du FN – à se reporter sur ma candidature et sans état d’âme, car il en va de l’avenir de la France." Nadine Morano.

2. "Les électeurs du FN partagent les mêmes valeurs qu'elle (Nadine Morano) et je partage les mêmes valeurs." François Fillon.

3. "Il n’y a aucune alliance avec le FN. Et je n’ai pas à recevoir de leçons de morale d’un Premier ministre, qui, lui, n’a aucun scrupule à faire alliance avec l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon." Jean-François Copé.

4. "Nadine Morano aurait dû raccrocher tout de suite car on ne parle pas aux dirigeants du FN. Il faut rejeter tous les extrémismes, FN comme Front de Gauche." François Fillon.

5. "Il faut fiche la paix à nos candidats qui se battent comme des chiens." Jean-François Copé.

6. "Je n'ai de leçon à recevoir de personne." Nadine Morano.

7. "Nadine Morano ne menace pas plus la démocratie que ceux qui s’allient avec Jean-Luc Mélenchon qui est ni plus ni moins que le dernier avatar du Parti communiste." Thierry Mariani.

Je suis impressionné par une telle constance. Je vous jure.

dimanche 10 juin 2012

Cinq ans

Pas grand chose à dire, en fait. Méluche se prend une nouvelle branlée aux législatives après celle de la présidentielle. Je lui conseille de relire Don Quichotte.

Le FN a été parfaitement servi par l'UMP, comme prévu. Le PS sauve les meubles grâce à ceux qui croient encore qu'un président de la république ne gouverne rien seul.

Bref, la lepénisation des esprits a fait son chemin électoral. Marine se prépare déjà pour 2017. La gauche a intérêt à réussir. Il lui reste cinq ans.

vendredi 1 juin 2012

Le fond

Comme un coup de grisou dans un puits sans fin, un tweet abscons m'est venu hier soir : "Le mineur naît naturellement bon. C'est la société qui le coron". Je m'en suis expliqué, mais comme j'ai une tête de pioche, j'ai décidé de creuser le sujet, comme dirait @Myriam.

C'est la faute à Zemmour, donc, et à la préparation, consécutive aux dernières saillies radiophoniques de ce dernier, d'une interview de Philippe Bilger sur la liberté d'expression, qui me minait un peu. C'est naturel : quand on va au charbon sur un terrain pareil, avec un interlocuteur si prompt à épater la galerie, mieux vaut étayer son propos.

Que les choses soient claires comme de l'eau de roche : je suis d'accord avec Bilger et Voltaire (@hipparkhos a raison, cette citation n'est pas certifiée d'origine, on en cause même sur la RTS) : "Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de le dire". Encore faut-il que les "je" soient exhaustifs quant aux "vous". En un mot : j'aime tellement la liberté d'expression que je considère qu'il est interdit d'interdire Zemmour, Guillon, Porte, Bedos fils, Alévêque et tous les autres rebrousseurs de poils.

Certes, j'ai égratigné, moi aussi, Zemmour sur la méthode, comme je l'ai fait jadis pour les autres précités. Pardonnez mon cynisme, mais la petite phrase est aussi un commerce, aussi choquant que cela puisse paraître pour nous ici qui nous contentons de les distribuer gratuitement. Les cadors des chroniques ne travaillent pas pour des klouts.

Ce à quoi ce cher Bilger va objecter : "Il est bien naturel qu'ils puissent vivre du fruit de leur travail. Ils le méritent, car eux seuls peuvent ouvrir des débats que la pensée unique ne cesse de fermer". C'est un argument en forme d'effet de manche : ces débats sont ouverts pour une minorité intellectuelle ayant accès à la culture et à la connaissance. Le grand public, lui, celui qui fait les audiences, ne creuse pas plus les petites phrases de Zemmour que celles de Loana (et comme vous l'aurez remarqué, je suis rousseauiste).

Mais surtout, le problème, c'est que les défenseurs de la liberté d'expression ont souvent la géométrie variable. Je m'étais amusé, début 2011, à placer Lionnel Luca, du collectif parlementaire pour la liberté d'expression, ardent défenseur de Zemmour, face à ses contradictions.

Nicolas Bedos venait de balancer, dans une chronique, que certains policiers, de nuit, étaient des "racailles tombées du bon côté" et avaient "un QI de poulpe mort". J'avais demandé à Luca s'il défendait aussi Bedos. Ce à quoi il m'avait répondu par l'affirmative... Jusqu'à la bronca des syndicats de policiers (voir le démenti embarrassé qu'il fit parvenir au Post).

Et voila, cher Philippe Bilger : il est tombé par terre, c'est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau... Bref, il est aussi improbable d'ouvrir un débat sur la probité des gendarmes que sur l'innocence des voleurs. Je vous jure : j'ai essayé. Mais je garde espoir : mine de rien, à force de rester à la surface des choses, on finira probablement un jour par toucher le fond.

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Mise à jour du 8 juin : mon interview de Bilger.

vendredi 18 mai 2012

Opposition

Entre la droite et les internets, nous le savons bien ici, y'a comme on dit un lourd passif. Nous ne sommes rien qu'un ramassis de pirates, d'anarchistes ou de gauchistes, c'est entendu.

Sauf que les choses devraient changer. Car autant, quand on détient le pouvoir, on peut matraquer les internautes à grands renforts de mesures législatives plus ou moins ineptes et de campagnes d'intoxication de l'opinion publique, autant, une fois qu'on se retrouve dans l'opposition, la liberté d'expression numérique devient un atout précieux.

Evidemment, encore faut-il savoir s'en servir et ne pas oublier que tout droit s'accompagne de devoirs. C'est là où la droite n'a pas complètement saisi la leçon ni tiré les enseignements de sa défaite sur le Web et dans les urnes.

Tout d'abord, ça n'est pas une question de quantité : pour ce que j'en vois - des vertes et des pas mûres, je vous jure - les forces en présence sont assez équilibrées, organisées et motivées.

Ensuite, hormis quelques flagrantes et notables exceptions dont je ne vais pas dresser la liste car vous les connaissez aussi bien que moi, ça n'est pas une affaire d'intelligence ou de talent.

Non, c'est une question d'humour. La gauchosphère a réussi à faire rire bien au-delà de ses bases (je connais des gens de droite qui adorent @vinceakadiego, @humourdedroite ou ont adoré - paix à son âme - @solferishow) tandis que la droitosphère se contente d'avaler vite fait des morceaux de clowns tristes au petit déjeuner.

Comme je l'ai déjà fait savoir (et merci aux nombreux démocrates d'avoir relayé mon propos) : faut pas leur en vouloir. Cela dit, l'internaute est perfectible. Et vu le temps libre dont ils disposent désormais, les ténors de l'exécutif sortant, moyennant une formation adaptée, ne devraient pas tarder à nous faire rire. Faut juste qu'ils acceptent que passer dans l'opposition, en politique, c'est très enrichissant.

jeudi 10 mai 2012

Mon rêve familier

Je sais bien que beaucoup de sujets sont plus important que celui-ci, mais moi, ça fait partie des choses qui me précoccupent. D'accord : la pipolisation de la vie politique est une dérive affreuse, inventée pour faire illusion. Une sorte de nouvel opium du peuple dans un monde où la messe cathodique célèbre les nouveaux dieux de l'image.

Mais mon métier de journaliste, ça n'est pas d'exprimer des jugements de valeur. Je les laisse, ici ou dans mes livres, à l'auteur. Le journaliste se penche donc depuis le 6 mai sur ce phénomène appliqué à Valérie et François, comme il l'avait fait avant avec Ségolène et François, Cécilia et Nicolas, Carla et Nicolas. Avec la même distance et la même rigueur. J'ai commencé mercredi et continué aujourd'hui, avec une interview de mon cher Christophe Carron (@krstv pour les intimes) et une autre de ma chère Besma Lahouri.

Entre les deux, j'ai glissé un tout petit commentaire, que voici :

"Hors mariage, Valérie Trierweiler reste une femme libre de s'épanouir. Des noces risqueraient, en la plaçant à l'ombre d'un mari, de la priver de lumière. Et puis des épousailles en plein quinquennat, comme Nicolas et Carla, ça ne fait pas vraiment changement. Or ils l'ont promis tous les deux : le changement, c'est maintenant. Première compagne prendrait alors presque davantage de sens que première dame, qui n'en a aucun. Comme pour lui permettre d'être ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre."

Les plus lettrés d'entre vous - et je sais que vous êtes nombreux - auront reconnu la référence dans la chute. Oui, c'est du Verlaine. Ce fameux poème saturnien dont la mélodie résonne inconsciemment dans toutes les têtes.

Bref. Juste pour dire que moi, même si le traitement de la pipolitique, c'est aussi mon métier, ça ne me dérangerait pas que la nouvelle présipeauté alimente moins la chronique que la précédente. Tiens, d'ailleurs, je crois même que c'est mon rêve familier à moi.

jeudi 26 avril 2012

Bêtes à cornes

Depuis des lustres, dans l'élevage, les Fafounet détenaient la recette miracle : pour éviter de perdre le bétail pendant les transhumances, ils criaient une série de mots qui déclenchaient inexorablement le rappel et le repli des bêtes à cornes. Et l'affaire prospérait, les têtes se multipliaient.

Un jour, d'autres éleveurs comprirent qu'ils pouvaient, eux aussi, se servir du même stratagème pour faire venir à eux les animaux. L'un d'eux, par ruse, suivit les Fafounet et nota scrupuleusement les termes employés. Il en fit une liste.

Fort courroucés, les Fafounet décidèrent de se défendre. Ce fut assez simple : il suffisait de comparer les copies et l'original de la liste de mots employés pour restituer les Fafounet dans leurs droits.

Mais les Fafounet s'aperçurent d'un étrange phénomène. A chaque fois qu'un autre éleveur utilisait leurs mots pour rassembler les ovins, nombre de ces derniers finissait par rejoindre les pâturages des Fafounet. Inutile, donc, de dénoncer les usurpateurs. Il suffisait de les laisser faire. Encore et encore. Leur empressement à répéter les mêmes mots assurerait la fortune des Fafounet.

Vous l'aurez compris : cette histoire est une fable. Dans la réalité, on attache les bêtes par les cornes avec de la corde. Ce sont les hommes qui se lient par la parole. Enfin. Je crois.

vendredi 20 avril 2012

Du clic

Qu'importe. Quand bien même les vierges effarouchées se cachent derrière le voile d'une déontologie transformée par les mites et les mythes en dentelle, on saura qui a fait combien avant d'avoir le droit de savoir qui a fait combien.

L'esprit moutonnier est ainsi fait dans cette corporation médiatique : une fois que le bélier a commencé à brouter l'herbe plus verte dans la pâture d'en-face, le troupeau suit.

Dimanche, dès que la première digue aura cédé, je vous parie que les autres lâcheront. Pourquoi ? Parce l'instinct des médias est grégaire et que surtout, "on ne va tout de même pas se laisser tondre l'audience de notre site".

Oui l'audience, les pages vues, les visiteurs uniques... C'est ça qui compte. Sur le Net, y'a pas de modèle économique, nous rabâche-t-on à longueur de conférences d'experts. Mais tous sont d'accord sur un point : faut faire venir des gens en masse, afin de vendre de l'espace publicitaire plus cher, sinon, ça sert à rien d'y être.

Il y a donc un modèle économique, celui de l'audience (comme sur les ondes), partagé par tous quand bien même il ne marche pas, vu qu'il ne nourrit pas son fournisseur de contenus.

Un jour, peut-être, on finira par redécouvrir que dans les urnes comme sur le marché, une bande de fidèles - aussi petite soit-elle - est plus efficace qu'un troupeau de zappeurs.

Mais pas demain. Demain, y'a encore dictature. La pire de toutes : celle du clic.

mercredi 18 avril 2012

Faciès

Nous vivons dans la société du contrôle au faciès depuis si longtemps. C'est devenu normal.

Nous consommons les produits qui ont de la gueule, épousons les conjoints qui ont l'air convenable, votons pour les candidats qui semblent les mieux qualifiés.

Sur quels critères ? Un seul : leur couleur, leurs courbes, leur bonne gueule.

Et comment s'en fait-on une idée juste ? Comme ces choix sont atrocement cornéliens, ils est plus simple de les déléguer à d'autres en qui nous plaçons notre aveugle confiance. Médias, instituts de sondages et autres grands prescripteurs d'opinion sauront mieux que nous y voir clair.

Forcément : le libre-arbitre n'est pas un produit de consommation ordinaire. Il ne se trouve pas dans la grande distribution, ni même dans les produits de luxe. C'est un article qui se bricole, à la maison, selon son inspiration, son talent, sa culture, son habileté, sa patience. Bref, ça coûte des efforts et ça prend du temps.

Et comme le temps, c'est aussi de l'argent, les marchands de libre-arbitre prospèrent.

Je crois qu'au final, ce temps-là n'est pas perdu, qu'il ne s'achète pas et qu'il ne doit pas être à vendre. Il vaut la peine qu'on le prenne.

Prenez le temps d'y réfléchir. Ça ne vous coûtera rien ou presque. Ça vous permettra aussi de reconnaître, dans le miroir, chaque matin, ce faciès qui est le vôtre.

vendredi 6 avril 2012

Ta mère

On y a pourtant cru. Le progrès, c'était promis, profiterait à tous, dans une croissance partagée. On a même fini par accepter l'idée que la mondialisation serait heureuse et que la liberté du marché tirerait les salaires des pays à bas coût vers le haut sans empêcher le vieux monde de s'empiffrer chaque jour davantage.

Alors nous avons acheté nos billets, préparé nos bagages et nous sommes montés à bord, convaincus que la croisière nous emporterait vers un nouveau monde meilleur.

La suite, vous la connaissez : on n'a pas vu les icebergs arriver assez tôt. Une fois le péril sous notre nez, le temps de dévier la trajectoire, c'était trop tard. Pire, on s'est rendu compte que tous les naufragés n'étaient pas égaux devant le droit à la chaloupe. Les femmes et les enfants d'abord, oui, mais les plus riches en premier.

De l'eau a coulé sur le pont. Sous les ponts aussi et ce vieux rêve d'un ailleurs plus clément n'ayant pas péri en mer, on a reconstruit d'autres paquebots, promis d'autres nouveaux mondes, vendu d'autres billets.

Cette envie des hommes de prendre le large... La vue sur la mer Égée s'affiche comme une nouvelle invitation à voguer vers d'autres horizons. Faut juste choisir le bon capitaine, celui qui sentira le danger venir avant l'inéluctable. En paquebot, en galère ou en pédalo, l'avenir serait donc encore une fois au large, même si les compagnies ont désormais pris la précaution d'inscrire dans le contrat que le risque de devoir ramer n'est pas exclu.

Je ne sais pas pourquoi, mais à chaque fois qu'on me propose d'embarquer sur un Titanic, j'ai envie de répondre : "Ta mère".

jeudi 22 mars 2012

Condition humaine

"Ces crimes ne sont pas ceux d'un fou. Un fou est irresponsable.
Ces crimes sont ceux d'un fanatique et d'un monstre."

L'humanité, c'est notre condition, même quand elle cesse de l'être. Et très régulièrement ressurgissent des monstres au beau milieu de la civilisation (désolé d'employer cette expression assez galvaudée ces derniers temps). On ne peut rien y faire ? C'est comme ça ?

J'en sais rien. Ce dont en revanche je suis certain, c'est que la monstruosité se nourrit et que quand on lui coupe les vivres, elle crève. Car oui, je suis de ceux qui pensent que nous sommes au moins le produit de nos conditions matérielles d'existence. Au moins, car en plus, on peut avoir la chance de disposer d'un libre arbitre quand les conditions culturelles et intellectuelles ont elles aussi été favorables.

Reste évidemment la part infime des maladies mentales graves qui peuvent rendre invisible la monstruosité à ceux qui en sont atteints.

Cela dit, quand le patient a pris une balle dans la tête, l'expertise psychiatrique devient particulièrement difficile. D'où l'intérêt de choper les criminels en vie : ça donne la possibilité de voir comment ils fonctionnent à l'intérieur. Cette sorte de tri entre l'inné et l'acquis qui précisément permet de mieux connaître notre condition humaine.

"Chercher une explication" au geste d'un auteur d'assassinats n'est pas une "faute morale" : c'est l'expression de la curiosité légitime des hommes qui ne veulent pas devenir des monstres.


mardi 20 mars 2012

Message de service

Silence radio, ici comme sur Twitter, tant que cette affaire dite du "tueur à scooter" n'aura pas été élucidée. Tout d'abord pour les familles des victimes. En France comme partout dans "le reste du monde", des enfants "qui ne demandaient qu'à vivre" ont été tués. Ici comme ailleurs, leur mort à chacun mérite plus qu'une minute de silence.

Aussi par respect pour la justice (la présomption d'innocence et les droits de la défense restent, même dans la monstruosité la plus absurde et absolue, des droits imprescriptibles) et le fonctionnement normal des institutions (ne confondons pas président et procureur de la République, ministre de l'intérieur et commissaire central, opposition et parties civiles).

Je suggère d'ailleurs à chacun d'y réfléchir vraiment : dans ce genre de circonstances, il est toujours plus raisonnable de fermer sa gueule quand on n'a rien à dire afin de laisser travailler ceux dont le métier est d'enquêter pour établir les faits et de les mettre en ordre dans le cadre juridique défini par nos lois.

J'espère enfin, sans me faire trop d'illusions, que nos candidats auront la décence de ne pas miser leur avenir politique sur l'issue de cette traque.

vendredi 16 mars 2012

Fumée

Priez pour nous pauvres pécheurs. Dans à peine plus d'un mois, l'heure sera venue d'aller à confesse dans l'isoloir, avec l'espoir que des urnes sortira cette fumée blanche attendue pour mettre fin au conclave électoral.

Il en a fallu et il en faudra encore, des palabres, aux quatre coins cardinaux, pour procéder à l'élection pontificale. Car la parole politique sur les ondes s'est multipliée comme les pains et les jeux. Le poisson aussi. Nos tribuns ont beau essayer de le noyer : il abonde. La pêche s'annonce miraculeuse.

Voilà donc un corps électoral affamé et repus. Les dents du fond baignent. La nausée s'installe. L'envie de vomir est proche. C'est notre faute. Battons-nous la coulpe. Nous accordons tant d'audience à ces messes médiatiques que les candidats n'ont d'autre choix que d'occuper au maximum cet espace grand ouvert. Il faut donner des images, dire des mots. Tout ou son contraire. Qu'importe. Le silence, c'est la mort.

Le risque, évidemment, c'est l'embrouille. Celle des orateurs tant est dense le chevauchement des tapis où les pieds peuvent se prendre. Celle aussi du public, dont les oreilles harassées par tant de bruit finissent par ne plus entendre rien.

Alors ces questions des uns et ces bavardages des autres tournent au vacarme insensé. Et ça en arrange beaucoup. Ceux-ci qui, pour cacher la vacuité de leur pensée, meublent la conversation. Ceux-là qui, incapables de se forger une opinion, attendent qu'on leur en fabrique une.

Au final, une majorité volatile et instable sortira du brouhaha, capable de changer d'avis du jour au lendemain. Derrière une sorte d'écran de fumée grise, un pape émergera, élu par des infidèles.

lundi 20 février 2012

Les bons comptes

Eh, toi, le dangereux Internaute, le pirate de la toile, le sauvageon du Net pas civilisé, tu veux faire du buzz ? Crée un compte antisarkozyste, chambre Morano (c'est pas très difficile), allume Guéant (il est déjà chaud) ou fait dire à notre cher président de la République le contraire de ce qu'il raconte (ce qui revient parfois à réaffirmer ce qu'il assurait avant d'avoir changé d'avis). Ça broute, mais ça ne mange pas de pain.

Tu peux aussi faire la même chose version antisocialiste. Entre la vie sexuelle de DSK, le régime de Hollande et la prise de La Rochelle par Ségolène, ça ne manque pas de matière de ce côté-là de l'échiquier politique.

Dans tous les cas et avec un peu de chance, à force de titiller les partis, tu vas finir au mieux bâché ou au pire reporté comme spam. À la main, par des vrais militants exaspérés, ou alors à plus grande échelle par des zombies tenus par d'autres militants tout aussi exaspérés. Oui, les moutons 2.0 ça existe, aussi bien à l'UMP qu'au PS.

Car tu le sais, toi, le dangereux Internaute, le pirate de la toile, le sauvageon du Net pas civilisé : ici, comme dans la vraie vie, c'est la jungle et tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. Cherche bien au fond de toi : tu es même capable de céder à la tentation de suspendre ton compte toi-même et d'en créer un autre pour dénoncer la censure. Alors ôte immédiatement cette mine surprise, car il se passe des choses bien pires encore.

Oui, pendant ce temps-là, ton ennemi a déjà fourbi ses armes pour la guerre des mails, qui ne fait que commencer.

Et enfin, n'oublie pas, toi, le dangereux Internaute, le pirate de la toile, le sauvageon du Net pas civilisé, que de vrais artistes de la parodie sont tombés les premiers au combat, peut-être parce que ceux qu'ils imitaient craignaient que le petit peuple ne sache pas faire, en ces temps troublés, la différence entre le vrai et le faux. Comme si les moutons IRL étaient aussi idiots que leurs clones 2.0.

Alors toi, le dangereux Internaute, le pirate de la toile, le sauvageon du Net pas civilisé, n'oublie jamais au moment de régler l'addition que les bons comptes font les bons amis.

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Mise à jour : je vous jure que je n'y suis pour rien...

Joint par Le Monde.fr, un responsable de l'équipe Internet de Nicolas Sarkozy explique avoir effectivement demandé à Twitter – par l'intermédiaire d'un formulaire en ligne – la fermeture de comptes pour usurpation de l'identité du président, en précisant que cela concerne les comptes utilisant le nom et le prénom du candidat : "Cela pouvait prêter à confusion les internautes cherchant à suivre Nicolas Sarkozy sur Twitter", justifie-t-on.

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Mise à jour (bis) : le Nico de Nico s'explique enfin et c'est beau.

mercredi 15 février 2012

Enfant de la télé

Ce soir, TF1, dont le boulot est de vendre aux limonadiers du temps de cerveau humain disponible, va en offrir un peu à Nicolas Sarkozy.

C'est une vieille histoire, Nico et TF1. Comme une Saint-Valentin quotidienne qui dure depuis dix ans. Tout remonte en effet à l'année 2001.

Souvenez-vous, cette année-là (comme disait Cloclo), TF1 se fit souffler Loft Story par une petite chaîne qui voulait monter, monter, monter...

TF1 décida alors de trouver un petit truc promis à monter. Ce fut Nico, qui devint quelques mois plus tard ministre de l'intérieur.

Mais pour faire monter les petits trucs, il faut les arroser. TF1 inventa alors la plateforme anxiogène de l'insécurité grandissante.

Une sorte d'engrais spécial pour ministre de l'intérieur. Un programme effrayant qui balançait bien avec la téléréalité abrutissante.

A 20 heures, on te fout la trouille, mais une heure plus tard, on te relaxe avec des cruchonnes et des crétins.

Bref, l'un et l'autre grandirent de ces programmes réducteurs, au point de devenir les maîtres d'un nouveau monde abruti.

Mais le pain et les jeux, pour ne pas lasser, doivent chaque jour s'enfoncer un peu plus bas pour tenir les audiences.

Nico est un enfant de la télé : il a grandi dedans et il finira avec elle (en dépit de ses efforts sur Facebook et Twitter). Le processus est engagé et il est irréversible.

lundi 6 février 2012

Biloute Guéant

Cher Claude Guéant

Mon âme de Ch'ti saigne. Oui, car toi, l'un des nôtres, né à Vimy, tu as osé pousser le bouchon au delà du raisonnable et avec lui, mémère dans les orties.

Tu sais bien que sur nos terres septentrionales, entre les Polaques, les Portos, les Arabes et les Ritals, au fond des puits de mine, au pied du mur de nos corons, autour d'une pizza ou d'un méchoui, nous n'avons jamais cherché à savoir laquelle de nos civilisations métissées était meilleure que l'autre.

Car, chacun s'émancipant de la place attribuée à la première génération, les suivantes ont poussé les murs et les frontières pour, au final, n'en former qu'une seule, humaine, fraternelle.

Je suis très déçu que tu puisses faire de ce passé table rase et oublier la richesse de ce terreau des terrils qui t'a fait grandir.

C'est la raison pour laquelle je t'écris cette deuxième lettre, la première étant d'ailleurs restée sans réponse.

Je me permets aussi de te tutoyer, car ça n'est pas au ministre que je m'adresse, mais au compatriote de cette civilisation improbable où des patrons souvent belges eurent l'idée de mêler des peuples venus des quatre coins du monde pour chauffer le cul de la France, fondre l'acier, filer du textile et coudre des vêtements. C'est à toi que je parle, biloute.

vendredi 3 février 2012

Les arènes

Imaginez un monde où vous seriez obligés par la loi de porter un badge avec vos noms, prénoms et adresse. Un monde où le défaut de port de cet insigne serait tellement sévèrement puni que certains en viendraient même à se tatouer ces informations personnelles sur le front. Impensable ?

Le monde dans lequel nous vivons est différent. Seules les forces de l'ordre ont le droit de vous demander de décliner votre identité et les papiers qui vont avec, parce qu'elles sont détentrices, par une délégation à laquelle nous consentons à chaque élection, d'une partie du monopole étatique de l'exercice légitime de la violence physique.

C'est une prérogative de puissance publique, constitutive de notre état de droit. Or, ce même état de droit est légitimé par le suffrage universel, qui envoie indirectement des citoyens au Sénat et d'autres, directement, à l'Assemblée nationale. Sans oublier le chef, élu au suffrage universel direct pour garantir le bon fonctionnement de l'ensemble.

Il se trouve que pour pouvoir prétendre à l'exercice de cette dernière fonction suprême, cette clé de voûte de l'édifice, les pères fondateurs de la constitution ont eu la sage idée de soumettre le candidat à l'entrée dans la course électorale présidentielle à un préalable : obtenir auprès des quelque 36.000 maires de France l'aval de 500 d'entre eux.

Mission impossible, crie donc Marine aujourd'hui comme son père hier. C'est une habitude dans la famille Le Pen. D'où cette idée de génie : l’anonymat des parrainages d’un candidat à l’élection présidentielle, qui ratisse large.

Là, j'ai vu rouge. D'où ce billet pour expliquer mon point de vue et le raccourci de la formule. Oui, le citoyen lambda a le droit de rester un anonyme, sur la place publique virtuelle ou réelle. Laissons aux forces de l'ordre le soin de vérifier son identité, pourvu que ces contrôles soient opérés dans les règles, ce qui n'est d'ailleurs pas toujours le cas. Non, les élus, petits ou grands, ne peuvent pas se planquer derrière un bulletin secret pour assumer leurs responsabilités.

Dans la vraie vie politique comme sur le Net, les choses sont assez binaires : on ne peut pas être à la fois spectateur dans les gradins et acteur dans l'amphithéâtre. Chacun doit assumer sa place dans les arènes.

jeudi 2 février 2012

Tribuns

Où sont les tribuns de la plèbe ? Plus que jamais la question se pose. Mais Georges Lavau n'est malheureusement plus là pour y répondre, lui qui avait si bien mis en évidence la fonction tribunitienne du parti communiste.

Le PCF se la fit piquer, cette fonction, par le FN, et avec elle pas mal d'électeurs.
Jean-Luc Mélenchon l'a bien compris en choisissant d'aller chercher Marine Le Pen là où elle est.

La majorité présidentielle veut revenir aux fondamentaux du P de l'UMP dans un rêve de droite populaire. Preuve en est la promotion d'un revenant des extrêmes de la droite - Guillaume Peltier - ou encore les mots choisis par Nicolas Sarkozy dans sa dernière intervention télévisée.

Au PS aussi. Dans un sursaut de conscience de classe, on se dit qu'il serait bon de penser à la cause du petit peuple.

Bref, les candidats au tribunat se sont multipliés. Et la plèbe attend la lumière.
"Les lois font les bagnes, les moeurs font les lupanars. La lumière crée le peuple, la nuit enfante la plèbe. La veste rouge du forçat est taillée dans la robe rouge du juge." (Victor Hugo, Quatrevingt-treize)

samedi 28 janvier 2012

Messe

Exceptionnellement, ce week-end, la messe dominicale sera ouverte à 20 h 15.

Alors évidemment, quand le Sauveur aura fini d'expliquer comment il va renvoyer le diable des marchés brûler en enfer...

Quand il aura démontré qu'il est en mesure de rendre les cieux de l'emploi immédiatement plus sereins...

Un noble serviteur de l'information aura l'outrecuidance spontanée de l'interroger sur son entrée en campagne...

Le Sauveur prendra le temps de l'humilité et du recueillement. Celui qui sépare l'acte de contrition et celui de candidature.

" Comment pouvez-vous imaginer un seul instant que mon propre sort puisse m'intéresser davantage que celui de la France ? "

" Tant de gens souffrent. Leur avenir transcende le mien ", ajoutera le Sauveur.

" Je ne suis pas candidat à la présidence de la République. Je suis candidat à la survie de la France. "

Reste à savoir combien de fidèles se prosterneront devant le Sauveur.


vendredi 27 janvier 2012

Président-people

Est-ce que la Ve République est par nature celle du président-people ?

Pierre Sudreau avait une réponse à cette question. Il était le dernier survivant de ceux qui ont apposé leur signature au bas de la Constitution. Grand résistant, ancien maire de Blois, ministre de la Construction à 39 ans (il était alors le cadet du premier gouvernement), il est mort le 22 janvier. Un dernier hommage lui a été rendu ce 27 janvier aux Invalides.

Il m'avait accordé une interview pour la Nouvelle République (malheureusement disparue du Web en changeant de site) en octobre 2008, à l'occasion du cinquantenaire de la Ve. Son regard était caustique. Et ses mots restent terriblement d'actualité. Pour lui, le 4 octobre 1958, le président de la République n’était pas appelé à devenir une star.

" Je trouvais que l’idée de faire élire le chef de l’État par un collège composé d’élus qui avaient fait leurs preuves en politique (80.000 grands électeurs, députés, sénateurs, conseillers généraux, maires...) était un gage d’équilibre des pouvoirs. "

Ce système avait porté, le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle à la fonction suprême, mais il ne satisfaisait toutefois pas le général.

" Je crois qu’il avait une inquiétude, une angoisse dans sa relation avec les Français. Il pensait que le suffrage universel direct serait pour lui une sûreté, une garantie. "

En 1962, le référendum organisé par Charles de Gaulle permet d’introduire dans la constitution l’élection au suffrage universel direct du Président. Pierre Sudreau y était opposé. Il démissionne.

" A l’époque déjà, étant donné le pouvoir grandissant des nouveaux instruments de communication, j’étais convaincu qu’on risquait de se retrouver avec n’importe qui à l’élection présidentielle, y compris et surtout ceux qui savaient manipuler l’opinion publique, sous l’influence de groupes et des puissances de l’argent (...) et assujettis aux soubresauts de l'actualité. "

Brutes épaisses

Sous quel régime vit-on ? Une dictature : celle de la balance. D'ailleurs, François Hollande aurait gagné des points en perdant du poids.

David Pujadas :
" Une stratégie de com’? "

François Hollande :

" C’était pour être en harmonie avec moi-même. "

Bref : du lourd dans le débat politique. La faute à Pierre Dukan ? C'est vrai qu'il a balancé des noms au grand journal et demandé aux candidats de faire de la réduction de la charge pondérale des Français une priorité nationale.

Mais ça n'est pas la première fois que les bourrelets présidentiels viennent peser sur le débat politique : on se souviendra avec émotion de cet été 2007 où Paris Match avait gommé les poignées d'amour de Nicolas Sarkozy. La suite, on la connaît : Julie Imperiali en a fait ses choux gras.

C'est comme ça : les candidats doivent être intelligents et minces. Et les électeurs ? Gros et cons ? Une question à laquelle Sophia Aram et Guy Carlier ou encore Didier Porte avaient essayé de réponde.

Quand la politique manque de légèreté, dans ce monde de brutes épaisses, quelques grammes de finesse ne peuvent pas faire de mal.

mercredi 25 janvier 2012

Doute

Stéphane Guillon à Nadine Morano :

"Danger de mort ! Amis piétons qui êtes sur Tweeter. Demandez tous à Morano où elle va rouler demain pour éviter le secteur !"

Nadine Morano en réponse à Stéphane Guillon :
"Ah si on pouvait rouler sur votre bêtise ça ferait du bien quelquefois !"

Voilà une conversation légère, presque anodine entre deux égos surdimensionnés sur un fait divers qui a bien failli coûter une vie, mais fort heureusement, elle est sauve.

C'est un tweet de @krstv qui a attiré mon attention et je me suis mis à essayer de comprendre. Rien de personnel. Je n'éprouve - personnellement et professionnellement - aucun sentiment à l'égard des politiques : je les observe.

J'ai comme tout le monde vu le phénomène apparaître et j'ai dit, comme toujours et quand bien même l'intéressée promettait le contraire, le fond de ma pensée.

L'incident aurait pu être clos en ce qui me concerne, car je ne suis pas monomaniaque. Sauf que là, j'ai trouvé particulièrement anormal qu'alors que @krstv lui posait des questions de fond sur cet accident, Nadine Morano choisisse de les ignorer au profit de cette petite joute douteuse avec un humoriste sulfureux jouissant d'une grande notoriété, du genre de celle qui peut vous faire accroître la votre.

D'autant qu'en essayant de comprendre l'empressement de la ministre à rejoindre Toul en demandant à un très cher confrère ce qu'elle avait de si important à y faire, j'ai compris qu'il n'y avait pas péril en la demeure. Puisqu'il avait si bien commencé le travail, cette information je l'ai transmise à @krstv, qui a poursuivi l'interview comme il se doit.

Me voici presque au milieu de la nuit à refaire ce film de série B et à douter de tout.

Je doute que le rôle d'un ministre de la République soit de venir sur Twitter pour se contenter d'y brasser de l'air.

Je doute qu'un chef de gouvernement digne de ce nom puisse laisser un de ses ministres s'égarer à ce point, tout comme je doute qu'un président de la République ne trouve rien à y redire.

Et tant qu'à faire dans le doute, je préfère encore croire que ces faits ne sont pas avérés.

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Mise à jour du 25 janvier 2012 à 11 h 35 : des précisions et les explications de Nadine Morano sur lci.tf1.fr et sur estrepublicain.fr

mercredi 18 janvier 2012

The day after

Ce 18 janvier 2012 restera marqué dans l'histoire de la vie politique française.

Nicolas Sarkozy, que l'on attendait sur l'annonce d'un nouveau plan de rigueur consécutif à l'abaissement de la note française, a retrouvé sa marque de fabrique et son coeur de métier : créer la surprise. Indépendamment des faits et des actes. Tant que l'annonce est forte, dans cette société de la mémoire courte, ça suffit : l'électeur oublie souvent de vérifier si les effets sont au rendez-vous des promesses.

Ainsi donc, ce 18 janvier 2012, tandis que François Hollande hésitait encore sur la façon de conjuguer relance de l'emploi et crise économique mondiale, Nicolas Sarkozy lui a volé la politesse d'un programme social en faveur de la France silencieuse qui peine en et dont c'est d'ailleurs la première préoccupation, bien devant l'insécurité, terrain déjà largement labouré, défriché et maintenant fertile. C'est bien joué.

Voilà qui va rendre au candidat de la majorité - certes réputé hésitant le matin devant le miroir de sa destinée - ces quelques points qui s'étaient étiolés au fil des dérives sécuritaires et libérales, que ses ministres assument désormais parfaitement à sa place.

Bref : de quoi envisager l'accouchement du premier tour de cette présidentielle 2012 sous les mêmes auspices qu'en 2002, ce que je ne cesse de répéter depuis un moment.

Cela dit, après la présidentielle : les législatives. J'imagine déjà le peuple de gauche qui, se sentant dupé, bafoué, outragé - comme souvent - trouve l'intelligence sur le tard - comme toujours - de s'unir pour porter une vague rose à l'Assemblée nationale, doublant ainsi celle du Sénat.

Le retour à la cohabitation ! Drôle de scénario. On appellerait le film The day after 6 mai 2012.

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D'ailleurs, il s'est mis après la publication de ce billet à causer peuple.

mardi 10 janvier 2012

Arsenal

Après tout, on s'infuse tellement d'analyses politiques à deux balles et de sondages foireux que j'ai bien le droit de lancer une enquête d'opinion auprès de moi-même pour répondre à la question : qui a vraiment peur de la candidature d'Éric Cantona : François Hollande, Nicolas Sarkozy ou Marine Le Pen ?

100 % des personnes interrogées ont répondu Nicolas Sarkozy. Et quand nos sondeurs leur ont demandé d'expliquer leur choix, elles ont répondu que si Cantona allait jusqu'au bout, il piquerait tellement de voix au FN que la fille Le Pen serait absente au second tour.

Or, comme notre panel a déjà eu l'occasion de le dire dans un précédent sondage, Nicolas - mais il n'est pas le seul - compte bien sur un choc frontal avec la petite Marine pour liquider la concurrence.

Cantona risque donc fort de se retrouver seul dans le match contre un arsenal qui n'hésitera pas à jouer la faute.

vendredi 6 janvier 2012

Excuses

J'ai reçu des excuses aujourd'hui. Sans importance. D'un adulte, ça m'a surpris. Je n'accepte que celles des enfants.

Je considère qu'eux seuls peuvent croire qu'il suffit d'en présenter pour obtenir un pardon. Parce que le monde ne fait que commencer à se défiler devant eux.

Je les leur accorde avec parcimonie, tout en m'efforçant de leur expliquer qu'à mesure des ans qui s'ajouteront, ils en trouveront moins.

Les excuses sont une ineptie. Le pardon une lâcheté pour présenter les siennes. Je n'ai jamais cru au aux produits nettoyants de la conscience.

J'ai au contraire la conviction que dans le livre de comptes de nos vies, tous les actes sont inscrits. Les uns à l'actif, les autres au passif, sans jamais que nous puissions avoir la certitude qu'ils ont été reportés dans le bonne colonne. Juste l'espoir qu'ils l'auront été sans erreur.

Je suis certain qu'on ne peut rien effacer. Ni le bien, pris ou reçu ; pas plus que le mal consenti ou volé.

Tout est gravé. Inaltérablement. Car si nos excuses devaient valoir absolution, ça ne vaudrait même pas la peine de les présenter.

mercredi 4 janvier 2012

Consensus

Ils ont encouragé d'un commun accord le démantèlement du charbon, du textile et de l'acier, juste parce que ces industries ne produisaient pas au moins 10% de dividendes. Maintenant ils pleurent devant la mondialisation.

Ils ont aboli dans un même élan la conscription et le droit aux enseignants de mettre des baffes aux sales gosses. Et ils ne comprennent plus pourquoi les sauvageons ont poussé de travers.

Ils se sont entendus pour aligner les échéances présidentielle et législative. Et les voilà qui commencent à sentir que l'hyperprésidence, ça motive peu les électeurs.

Ils sont d'accord pour jouer ensemble aux petites phrases pour décider de l'avenir de la nation, tout en sentant que ça ne va pas nous mener bien loin.

Et soudain, ils sont pris de regrets. Ils finiront peut être par se rendre compte que ce qui les étouffe aujourd'hui, ce sont leurs consensus d'hier.

dimanche 1 janvier 2012

Navigateurs

Le Web n'est pas un océan immatériel, sans carte, compas ni trésor, où ne navigueraient que des flibustiers et d'audacieux capitaines avides de nouveaux mondes. La toile est tissée d'os, de chair et de sang et l'idée selon laquelle ce qui s'y vit est irréel est un fantasme.

Ici s'expriment des humains, qui retranscrivent leur réel ou qui viennent ajouter à l'expérience du leur celui que les autres ont numérisé.

Un seul clic les sépare, comme un battement de paupière. Celui de la diffusion et de la prise de connaissance. Émission, réception : c'est le même geste. Une pression de l'index comme sur la détente d'une arme pointée vers l'autre ou retournée contre soi-même.

On se tue à comprendre des choses que certains se crèvent à essayer de nous expliquer. Et vice-versa. Ça a toujours été comme ça. C'est l'histoire de l'humanité. Scribes, saltimbanques, imprimeurs, peintres, conteurs, cinéastes, éditeurs, photographes, auteurs de best sellers ou de billets perdus au plus profond du Net, de grands reportages ou de mots couchés sur l'intimité des pages d'un journal caché.

L'homme n'a pas inventé les mots pour qu'ils s'envolent, ni les images pour être effacées. Il ne les produit pas pour lui-même, tout en ignorant la liste des destinataires, ni même s'il en existe un seul. Il glisse des messages dans de fragiles bouteilles qu'il envoie à la mer sans savoir où elles échoueront, couchées par la marée sur une plage de sable fin où brisée contre les roches d'intraitables abysses. Et ça, nos navigateurs ne nous l'indiqueront jamais.